Cette brève histoire de la Cadière, qui s'étend jusqu'au XVIIIème siècle
est proposée par l'Académie du Var dans son bulletin de l'année 1904
La Cadière est un ancien bourg très pittoresquement bâti en amphithéâtre à l'extrémité d'une colline rocheuse, à 6 kilomètres du Beausset et à 23 kilomètres de Toulon.
Au IXe siècle, à l'époque où les invasions des Sarrasins désolaient la Provence, les malheureux habitants du littoral se voyant forcés de quitter leurs demeures, cherchèrent un refuge sur les hauteurs environnantes. Le coteau de la Cadière, alors très boisé, présentant une forte position d'où l'on voyait la mer sans en être vu, attira leur attention et ils « vinrent établir leurs premières retraites sous des rochers avancés dont ils fermèrent le devant par une muraille qui les mettait à l'abri des vents du Nord. On voit encore de ces bâtisses[1]. » Plus tard, ils édifièrent leurs demeures sur le plateau, les entourèrent de remparts, et les nouveaux murs donnèrent asile aux pêcheurs du littoral et aux cultivateurs de la riche vallée de Saint-Côme.
Au Xe siècle, Conrad le Pacifique, roi de Bourgogne et d'Arles, donna ce territoire à Guillaume Ier en récompense des services que ce comte avait rendus au pays en expulsant les Sarrasins. Guillaume à son tour, céda toute la contrée aux vicomtes de Marseille, qui furent ainsi les premiers seigneurs de la Cadière. On trouve dans les archives de cette commune, la copie d'un acte de 1019, dans lequel il est question d'une donation de la huitième partie de la Cadière faite par Foulques de Marseille, tant en son nom qu'au nom d'Odila, sa femme, au Monastère de Saint-Victor.
En 1044, Foulques donna à l'Abbaye plusieurs autres biens qu'il possédait à Marseille, à Six-Fours, aux Baumelles, quartier de la Cadière, etc. La même année, Pons II, évêque de Marseille, et son chapitre donnèrent à cette abbaye toutes les dîmes qu'ils avaient à Ceyreste, à la Cadière, etc. En 1048, Lambert, mari de la princesse Astrade, donna sa portion de terre de la Cadière à la même Abbaye, en paiement d'une somme d'argent qu'elle lui avait prêté.
En 1211, Roncelin, des vicomtes de Marseille, partagea ce qui lui restait des terres de la Cadière, du Castellet, etc., entre Hugues des Baux et Adhémar, ses neveux. Ce ne fut que par la vente qu'en fit Raymond le 22 janvier 1365 que cette terre passa entièrement sous la seigneurie de l'abbé de Saint-Victor. Enfin, en 1364, la reine Jeanne, comtesse de Provence, fit donation au Monastère de Saint-Victor du droit de régale, premières appellations et pasquiers, que les comtes de Provence avaient au lieu de la Cadière et sur son terroir. Les vicomtes de Marseille, et surtout les abbés de Saint-Victor qui leur succédèrent, n'étaient pas de mauvais maîtres. Les vassaux de ces derniers vivaient paternellement sous la crosse, se nommant des juges dont la sentence était souveraine et des officiers municipaux exerçant la police en commun avec les officiers des seigneurs. « Sur cette terré privilégiée, a dit à l'Institut M. Lenormand, où jamais le servage féodal ne fut connu, la République municipale se fonda naturellement. » Aussi, pendant la Révolution, le peuple des possessions de l'Abbaye est resté calme et pur de tout excès, tandis que celui des localités voisines n'a point agi de même. De toutes les communes de l'arrondissement de Toulon, la Cadière est la seule qui ait préservé ses archives de la dévastation révolutionnaire. Ces archives remontent à l'an 1283.
En 1564, Charles IX y coucha, lors de son voyage en Provence. En 1592, sous le règne de Henri IV, la Cadière soutint un siège de deux jours et ses murailles furent battues de 250 coups de canons par le sieur de Lesdiguières. Les habitants de cette bourgade, obligés de céder à la force, malgré leur vigoureuse résistance, ne furent épargnés du sac et du pillage qu'en donnant la somme de vingt mille écus[2].
Dans sa Géographie de Provence, l'historien Bouche dit encore : « In primis castrum Cadheria, La Cadière, onze feux en la viguerie d'Aix. Dans les archives de Saint-Victor de l'an 1019, et dans la bulle de Grégoire VII de l'an 1084. il est écrit Cathedra[3]. » Ceci nous explique l'origine des armes de cette commune. La Cadière, en latin Cathedra, porte d'azur à une chaire de prédicateur, d'or, et un chef cousu de gueules, chargé d'un sautoir alaise d'or[4]. Achard[5] donne deux variantes de ces armoiries, il dit : « l'écusson des armes de la Cadière portait, d'azur à un tabouret d'or, au chef de gueules chargé de la croix d'or en sautoir. Aujourd'hui le fond est de gueules à la croix de Saint André d'or avec un tabouret au milieu. » Que l'on prenne le texte de l'armorial ou les variantes d'Achard, de toutes les manières ces armes sont parlantes. C'est toujours une chaire (cathedra), ou un tabouret, avec un sautoir ou une croix de Saint-André qui en font l'objet principal.
[1] Achard. Géographie de la Provence, T. L, p. 386.
[2] Bouche. Histoire de Provence, T. II, p. 768.
[3] Bouche. Histoire de Provence, T. I, p. 334.
[4] Armorial d'Hosier, T. I. page 4 du texte ; et T. I. page 1048 des blasons.
[5] Achard. Géographie de la Provence. T. I. p. 384.
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- Chapelle et fontaine Saint-Jean
- Murs et portes de la bourgade
- Chapelle N.-D. de la Miséricorde
- Chapelle de N.-D. de Lorette
- Chapelle N.-D. de Consolation
PÉRIODE NÉOLITHIQUE
Époque Celtique
Un assez grand nombre de haches et de pointes de flèches en silex taillé, ont été trouvées dans les bois de la Cadière[1].
[1] Magl. Giraud. Répertoire archéologique du Canton du Beausset.
Époque Ligurienne
Un grand tumulus non exploré a été remarqué entre la Cadière et l'ancien village de Ceyreste[2].
[2] Carte archéologique du Var, p. 13.
PÉRIODE GALLO-ROMAINE
Mégalithe
Les pierres connues sous le nom de mégalithe de la Cadière, sont encastrées à l'angle d'un mur de clôture situé au-dessous et au nord du village. Ce sont les restes d'un monument très ancien dont on ignore l'usage et la destination. Elles sont situées à 1 kilomètre environ du tombeau nommé les Belles Pierres, mais elles ont pu être apportées là de beaucoup plus loin. Cette mégalithe se compose de quatre pierres rectangulaires d'assez grandes dimensions, environ 1,20 m de long, 0,80 m de large et 0,35 m d'épaisseur. Ces pierres sont mal équarries et grossièrement creusées en forme de cuvettes doubles et inégales. La taille archaïque de ces quatre blocs de calcaire a fait supposer qu'ils appartenaient à une haute antiquité. Malgré leur rusticité, ces pierres ne nous paraissent pas remonter aussi loin. Elles ont été retirées du sol avec d'autres débris gallo-romains, tout près du lieu où elles sont placées, et nous ne pensons pas qu'elles soient antérieures à l'occupation romaine.
Prieuré de Saint-Damien
Le Prieuré rural de Saint-Damien, situé dans la vallée de Saint-Côme au terroir de la Cadière, appartenait anciennement à l'évêque de Marseille Honoré II, évêque de cette ville, qui n'a laissé pour toute mémoire de lui que son nom [1] en fit don à l'Abbaye de Saint-Victor le 31 octobre 966. Ce fut le premier bien temporel que l'Abbaye posséda [2] .
En 1554, les abbés de Saint-Victor ayant inféodé les terres de Saint-Damien et du Plan-de-la-Tour, à la communauté de la Cadière qui lui payait une cense féodale, cette église fut délaissée et on y bâtit tout auprès une petite chapelle, aujourd'hui abandonnée et tombant en ruines.
Cette maison ou ce monastère, dit Magloire Giraud dans son Histoire du Prieuré de Saint-Damien, d'une architecture simple, présente quant au système de maçonnerie, les plus grands rapports avec la construction romaine de grand appareil. Les pierres plus larges que hautes sont grossièrement taillées et posées en assises régulières, mode de construction usité dans les Xe et XI e siècles. L'édifice construit comme la plupart des monastères, sur le plan de la maison romaine, s'élevait sur le flanc septentrionnal et s'appuyait sur une aile de l'église. L'ensemble avait la forme d'un parallélogramme rectangle. L'intérieur vaste et bien distribué offrait toutes les aisances d'une habitation commune et l'avantage d'établir une communication avec l'église au moyen d'un cloître dont l'enceinte laissée à ciel ouvert, servait de cimetière aux religieux. Il ne subsiste guère des bâtiments conventuels que quelques pans de muraille qui avaient 2 mètres d'épaisseur. L'édifice avait 30 mètres de long et 15 mètres de large. A cette maison conventuelle était contiguë une haute tour pour servir de refuge et de défense aux moines quand ils étaient attaqués par les Sarrasins et après eux, par les pirates barbaresques dans les fréquentes descentes qu'ils firent sur cette partie du littoral. Cette tour était encore en état de parfaite conservation à la fin du XVIIIe siècle. La Communauté avait pris soin de la préserver jusqu'alors de la dévastation en punissant d'une amende de dix florins quiconque y ferait la moindre dégradation. Une garde de six hommes y fut placée pour la défendre, lorsque le connétable Lesdiguières vint assiéger la Cadière, le 2 juillet 1592.
L'église élevée sur le plan cruciforme, était précédée d'une cour ou atrium et n'avait qu'une nef terminée par une abside carrée. Elle était orientée du levant au couchant suivant la règle symbolique adoptée et conservée pour les édifices religieux jusqu'à la fin du XVIe siècle.
La chapelle actuelle occupe le chœur de l'ancienne église, elle se compose d'une seule nef voûtée en berceau et a pour seul ornement un tableau qui n'a de remarquable que sa vétusté.
La largeur de cette chapelle étant de 3,80 m à l'intérieur, le transept de l'église prieurale aurait donc eu 11,40 m, et la nef 19 m de longueur, en multipliant par 5 la largeur de l'édifice, proportion ordinaire ; les murs ont 1,15 m d'épaisseur ; ils sont construits comme ceux du monastère, en pierres grossièrement taillées, d'inégale largeur, plus longues que hautes et séparées par une couche de mortier très épaisse et parfois saillante ; mais ici on a employé le moyen appareil.
Au fond de l'abside on trouve cachée dans la muraille, une fenêtre évasée en plein cintre ; la hauteur où elle se trouve placée prouve que le sol de l'ancienne église était beaucoup plus bas que celui de la chapelle actuelle.
La voûte de l'église prieurale était en berceau avec nervures toriques. Il en existait encore des restes considérables à la fin du XVIIIe siècle ; on les démolit à cette époque, ainsi que la tour carrée, et les matériaux servirent à la construction des bastides voisines ou à faire des murs de soutènement.
La chapelle actuelle sous le vocable de Saint-Côme, fut construite au XVIIIe siècle sur les ruines de l'église du monastère. Plus tard elle fût augmentée d'un porche ; elle est aujourd'hui complètement abandonnée et tombe en ruines.
[1] Ruffi. Histoire de Marseille, p. 322.
[2] Achard. Géographie de la Provence, T. I, p. 382.
Abris sous roche
Nous avons dit en commençant que les premiers habitants de la Cadière furent ces malheureuses familles du littoral qui furent obligées vers le IXe siècle, de fuir le rivage pour aller se réfugier dans l'intérieur des terres.
Les fugitifs qui suivirent la vallée de Saint-Côme et se dirigèrent sur le coteau rocheux, montant en pente douce vers le Nord-Est, trouvèrent à son extrémité un grand escarpement où la dislocation des assises avait formé des enfoncements et des cavités pouvant servir d'abris.
Les restes de bâtisses encore apparentes dans ces rochers, montrent que les hommes qui vinrent s'établir dans ces lieux fermèrent leurs demeures souterraines avec de bonnes murailles de pierres pour s'abriter des vents du Nord et pour dissimuler leur présence aux bandes sarrasines qui dévastaient le pays.
Chapelle et fontaine Saint-Jean-Baptiste
Cette chapelle rurale fut édifiée vers le Xe siècle près d'une ancienne fontaine romaine très fréquentée pendant les siècles de paganisme. Complètement remaniée depuis cette époque, et augmentée d'un porche, elle présente aujourd'hui les caractères ambigus des XVIe et XVIIe siècles. Elle a pour dimensions extérieures : longueur 10,20 m, largeur 4,20 m ; hauteur 4,50 m.
Pendant l'antiquité, la fontaine de Saint-Jean-Baptiste était une source abondante captée, canalisée et consacrée à une divinité du paganisme comme l'attestent les vestiges romains et la grande quantité de médailles des premiers empereurs que l'on y a trouvé.
Vers le Xe siècle, les moines de Saint-Damien établis dans la vallée de Saint-Côme, voulant effacer le souvenir de la divinité païenne à laquelle elle était consacrée, élevèrent sur ses bords la Capella Sancti Johannis in territorio et la fontaine antique prit le nom de Saint-Jean-Baptiste qu'elle porte encore aujourd'hui.
Pendant tout le moyen-âge les habitants de la Cadière n'ont eu que cette source pour s'approvisionner d'eau pure. Aujourd'hui le village est doté d'une vaste citerne qui suffit aux besoins journaliers et alimente plusieurs fontaines.
La chapelle de Saint-Jean-Baptiste et la source abondante qui coule à ses pieds, étaient autrefois entourées de chênes séculaires dont il ne reste plus que quelques rejetons. La foule s'y rendait avec empressement le 24 juin et trouvait sous ces ombrages la fraîcheur et des divertissements. Il s'y tenait une foire établie par Charles IX, lors de son passage à la Cadière. Cette foire fut transférée au 2 mai en 1631, sous le règne de Louis XIII.
Au XVIIe siècle, comme l'indique la mention "LE 30 AV. 1620" gravée sur une pierre, on restaura cette fontaine en y construisant un bassin ou abreuvoir pour les chevaux, et en la décorant de quatre têtes grossièrement sculptées, versant l'eau dans ce bassin.
Château Féodal
Le château féodal de la Cadière, bâti par les vicomtes de Marseille, était situé au quartier de Cavaillon sur le point le plus élevé du plateau. Abandonné depuis longtemps et tombé en ruines, il fut démoli au XVIe siècle pour faire place à la chapelle des Pénitents blancs. Aujourd'hui il ne reste plus de cet ancien édifice qu'un vestige de tour ronde paraissant remonter au XIIIe siècle.
Au moment de la démolition de ce vieil édifice, un habitant du village recueillit les quatre figures en pierre dure qui étaient au bas des tourelles du château et les encastra dans le mur de sa maison. Ce sont les quatre personnages grotesques, sculptés en bas-relief, que l'on voit à la maison qui fait le coin de la rue du Greffe et de la rue des Consuls. Trois de ces figures représentent des génies ailés tenant un écusson entre leurs mains et la quatrième, un homme assis, ayant la main droite sur la poitrine et tenant de la main gauche un globe crucifère appuyé sur ses genoux.
Murs et portes de la Bourgade
Le bourg de la Cadière présentait autrefois le système de défense usité au XIIe siècle, c'est-à-dire qu'il était défendu par une double muraille construite en pierres calcaires de moyen et de petit appareil, formant d'abord une enceinte intérieure continue autour du château féodal, ensuite une deuxième enceinte également continue, autour des maisons. On entrait dans la ville par trois portes ouvertes successivement dans les murs extérieurs : la porte de Cavaillon, la porte de la Colle et la porte du Peï. La porte Mazarine ne fut percée dans les remparts qu'au XVIe siècle.
La porte de Cavaillon était située au point le plus élevé du village, devant la chapelle de Sainte-Magdeleine et a été démolie en même temps que le château.
La porte de la Colle, située à l'ouest de la ville, s'ouvrait dans une tour carrée bâtie comme les murailles, en pierres calcaires de moyen appareil dans le bas et de petit appareil dans le haut. Elle a son archivolte en plein cintre et sa voûte en berceau. On la fermait au moyen d'une herse et d'une porte à deux vantaux. La herse, en bois et en fer, descendait du premier étage de la tour par cette large baie percée dans la voûte, et les vantaux, dont on voit encore les gonds en fer scellés dans les murs, étaient retenus en dedans par une forte barre de bois, que l'on tirait toute entière d'un trou carré pratiqué dans l'épaisseur du mur à cet effet. Les dimensions de cette entrée sont les suivantes : largeur entre les murs latéraux 2,70 m, profondeur 3,00 m, hauteur sous la voûte 3,40 m.
La porte du Peï, située au sud de la ville, et à peu près au milieu de la longueur des murailles, devait s'ouvrir dans une tour, comme la porte de la Colle et comme toutes les entrées des villes de cette époque, mais il n'en reste aucune trace, ni au-dehors, ni au-dedans ; les maisons particulières élevées sur les remparts de la vieille cité ont tout fait disparaître. La voûte porte encore l'entaille d'où descendait la herse, et, chose plus rare, les battants de la porte du Moyen-Âge existent encore. Ils sont en bois dur, d'une assez forte épaisseur, tout hérissés de clous portant des sigles du XIIIe siècle. Cette entrée, la principale de l'ancien village, a les dimensions suivantes : largeur entre murs latéraux 2,80 m, profondeur 2,85 m, hauteur sous la voûte 2,30 m.
La porte Mazarine, située au sud-est, n'est qu'un passage ouvert dans la muraille pour la commodité des habitants, mais n'a jamais présenté le moindre caractère défensif. En 1657, Mazarin permit de percer le rempart de la Cadière et d'ajouter aux portes de Saint-Jean, de la Colle (Collis) et de Cavaillon qui avaient été successivement ouvertes, une quatrième porte qui, pour cette raison, fut appelée Porte Mazarine. À côté de cette porte se trouve la maison où logea le roi Charles IX, lors de son passage à la Cadière en 1564.
Maisons d'habitation
Dans le haut du village, particulièrement dans la rue de la Colle, on trouve encore quelques maisons des XVe et XVIe siècles, dont les portes d'entrée à linteau droit, avec ou sans arc en accolade, sont datées ou portent des emblèmes du Moyen-Âge. Dans la rue de l'Église, on en voit quelques-unes ayant leurs façades en encorbellement sur la rue, leurs escaliers en tourelle et leurs portes d'entrée en anse de panier, la plupart portant le millésime de leur construction ou des images symboliques de leur temps.
Hôpital des lépreux (Ladrerie)
Le quartier de Ladre, est ainsi nommé à cause d'une ancienne maladrerie où l'on soignait les lépreux. On trouve dans les Archives de la Commune[1], la Bastide de la Ladrerie, mentionnée en 1557.
[1] Arch. de la Cadière. Documents antérieurs à 1790.
Église paroissiale
L'église paroissiale de la Cadière fut fondée au XIIe siècle sous le vocable de Saint-André, Elle fut démolie au commencement du XVIe siècle et reconstruite sur le même emplacement et sous le même vocable en 1508. Après plusieurs agrandissements successifs elle est devenue le monument irrégulier que nous voyons aujourd'hui.
L'ancienne église, bâtie dans le style roman avait la forme d'une croix latine et s'étendait du couchant au levant sur trois arceaux en plein cintre. La tour du clocher est le seul vestige qui soit resté de cette église. C'est une tour carrée lourde et massive, toute noircie par le temps, percée sur les quatre faces d'ouvertures à plein cintre et terminée par un toit à double pente. La grosse cloche porte l'inscription suivante en caractères gothiques : XPS vincit : XPS régnat : XPS imperat : XPS ab omni malo nos defendat. MCCCCXLVIII.
L'église, reconstruite en 1508 dans le style ogival de la troisième époque (flamboyant) sur l'emplacement de l'ancienne et avec la même orientation se composait d'une nef à trois travées terminée par une abside polygonale.
Successivement agrandie en 1601, en 1682, en 1741 et en 1782, elle a aujourd'hui une nef entre deux collatéraux irréguliers.
Cette église renfermait autrefois plusieurs chapelles d'inégales grandeurs percées dans les murs latéraux ; c'est en supprimant ces chapelles et en les remplaçant par de simples autels en marbre adossés contre les murs latéraux que l'on a pu ouvrir deux bas-côtés très irréguliers mais dans le même style.
La voûte en plein cintre, est à croisillon avec pendentifs. Elle repose sur des piliers à colonnettes sans chapiteaux, d'où s'élancent des nervures prismatiques.
Les dimensions de cette église sont les suivantes :
- longueur y compris l'abside, 27,00 m
- largeur de la nef, 6,45 m,
- hauteur sous la voûte, 12,20 m.
Entrée
La porte d'entrée en arc surbaissé, est surmontée d'une arcade en doucine dont les extrémités se relèvent verticalement en pilastre et soutiennent une croix. Entre l'arcade et l'estrados une petite niche contient l'image de saint André.
Clocher
Le nouveau clocher, construit sur un plan hexagonal, est surmonté d'une flèche de même forme, flanquée de clochetons. La tour est percée de baies ogivales trilobées et couronnée par une balustrade à jour composée de quatre feuilles.
Ses dimensions en hauteur sont les suivantes :
- Hauteur de la tour : 21,00 m
- Hauteur de la flèche : 11,00 m
- Hauteur totale : 32,00 m
Autel
Le grand autel surmonté d'un ciborium à colonne qui est lui seul un monument, est remarquable autant par l'élégance de sa forme que par la richesse et la variété des marbres qui le composent. Ce bel ouvrage de sculpture fut acheté en 1773 pour le prix de 3.000 Fr.
Peinture
Aucun tableau un peu remarquable n'attire l'attention du visiteur. Celui de saint Joseph agonisant, attribué à Michel Serre, n'est qu'une copie. L'original est au Musée de Marseille, et il est mentionné sur le catalogue : Michel Serre, 206. L'agonie de Saint Joseph.
Sculpture
Avant la Révolution, l'église paroissiale de la Cadière possédait une belle statue d'argent de la Vierge et une autre de saint André que la Communauté, par délibération du 21 mars 1743, fit exécuter à Paris pour le prix de 4.000 livres. Transformée en temple de la Raison en 1793, l'église de Saint-André fut dépouillée de tout ce qu'elle possédait. Une seule petite statuette votive de Saint André en argent put être soustraite aux recherches révolutionnaires. Cette petite figure date de 1633, trois années après la contagion qui décima horriblement les populations du Beausset, du Castellet et autres lieux voisins, mais dont la Cadière fut préservée. On trouve encore dans cette église un pupitre en bois portant la date 1567.
Vitraux
Des vitraux historiques, dont quelques-uns anciens et riches en couleur, remplissent les baies des fenêtres ogivales, croisées par une simple colonnette. À l'une des fenêtres de l'abside on voit le buste de saint André apôtre ; sur l'autre, dans le premier compartiment, saint André embrassant la Croix, et dans le second saint Pierre tenant les clefs dans la main ; l'un et l'autre portant le nimbe circulaire double doré. Sur une des fenêtres de la grande nef est représenté le baptême de Jésus par saint Jean-Baptiste. Sur les autres il n'y a que des ornements. On voit au premier coup d'œil que tous les vitraux de cette église ne sont pas de la même époque. Autant les plus anciens, placés dans l'abside, sont hauts en couleur, d'un ton chaud et harmonieux, autant les plus modernes, placés dans la nef et bien moins conservés, sont pâles, d'un ton froid et discordant. On voyait autrefois des armoiries royales sur le vitrail d'une petite rose placée au fond de l'abside. La rose de la grande nef, à meneaux flamboyants, est aussi garnie de vitraux aux couleurs chatoyantes, malheureusement la tribune construite en 1711 en détruit le bel effet.
Chapelle annexe
Dans un appartement contigu à l'église paroissiale se trouve une petite chapelle dédiée à sainte Marthe, servant aux exercices de piété de la congrégation des demoiselles. On y voit une jolie boiserie sculptée du XVIIe siècle, composée de panneaux avec arabesques séparés par des colonnes torses, cannelées. Le tableau placé au-dessus de l'autel est sans valeur artistique.
Chapelle de Sainte-Magdeleine
Le 3 mars 1566, les Pénitents blancs s'établirent à la Cadière avec l'approbation de Mgr Pierre Ragueneau, évêque de Marseille, sous le titre de Sainte-Marie-Magdeleine. L'année suivante, ils bâtirent leur chapelle sur l'emplacement du château féodal, et la communauté leur accorda 14 écus pour en faciliter la construction.
Cette chapelle présente les dispositions suivantes : plan rectangulaire composé d'une nef terminée par une abside en cul de four ; voûte à croisillons ; porte et fenêtres cintrées ; toit à double pente ; clocheton arcade ; cimetière contigu à la chapelle. Le mur occidental est un reste des remparts de la ville.
À l'intérieur de cette chapelle on trouve quelques toiles de l'école flamande représentant des sujets tirés de la bible et l'on y voit plusieurs tableaux de peintres marseillais figurant les principaux traits de la vie de sainte Magdeleine, tels que :
- Magdeleine chez Simon le Pharisien, peint pas Claude Despeches.
- Jésus apparaissant à Magdeleine sous les traits d'un jardinier, peint par Arnaud, directeur de l'école de dessin de Marseille.
- L'arrivée de Magdeleine, Lazare, Marthe, Maximin et autres saints personnages au port de Marseille, vis-à-vis le monastère de Saint-Victor.
- Magdeleine recevant la communion de Saint Maximin etc.
Le chapiteau corinthien en marbre blanc qui soutient la crédence, provient des ruines des Lèques, dites de Tauroentum.
Chapelle de Saint-Eloy
De toutes les corporations de métiers organisées à la Cadière, depuis le XVIe siècle, il ne reste plus que celle des muletiers et charretiers mentionnée dans les archives de cette commune en 1588. Cette ancienne corporation a sa petite chapelle au bas du village, dans un lieu un peu écarté des maisons. C'est là que le 25 juin, jour de la Saint Eloy, tous ces artisans, montés sur des chevaux, des mulets et des ânes, tous caparaçonnés le plus richement possible, viennent depuis plus de trois cent ans, pour y recevoir la bénédiction avant de se livrer aux jeux de leur bruyante fête. Ce sanctuaire rustique porte la date de sa dernière restauration, 1857, au-dessus de la porte d'entrée et présente les dispositions suivantes : plan rectangulaire composé d'un porche à trois entrées et d'une nef terminée par un abside en cul de four. Voûte en berceau, fenêtres étroites et cintrées ; porte d'entrée à linteau droit accostée de deux fenêtres carrées ; toit à double pente et clocheton arcade sur le faîte. Ses dimensions prises à l'extérieur sont : longueur totale 7,60 m, largeur 4,80 m, hauteur 4,50 m.
Chapelle N.-D. de Piété
Cette chapelle fondée au commencement du XVIIe siècle et mentionnée en 1615 (N.D. de Piétat), a été transformée en moulin à huile.
Chapelle N.-D. de la Miséricorde
Les Pénitents noirs de la Cadière se formèrent en congrégation le 12 août 1633, sous l'invocation de N.-D. de la Miséricorde et construisirent l'année suivante la grande et belle chapelle qui existe encore aujourd'hui. Ils occupèrent d'abord la petite chapelle de Saint Eloy, mais ils transportèrent leur service religieux dans le nouveau sanctuaire dès que leur propre chapelle put les recevoir. C'est là que l'on enterrait les personnes de distinction décédées dans le village. C'est dans la chapelle de la Miséricorde que fut enseveli le 8 décembre 1726, Joseph Lieutaud, sculpteur distingué et ami de Pierre Puget. Mais voyant là un abus, l'évêque de Marseille, par une décision du 6 avril 1736, leur défendit de porter à la sépulture d'autres morts que ceux de leur compagnie.
La chapelle de la Miséricorde présente les dispositions suivantes : plan rectangulaire composé d'une nef terminée par une abside semi-circulaire. Plafond uni, fenêtres évasées, cintrées ; toit à double pente ; clocheton arcade sur le faîte. Ses dimensions sont les suivantes :
- Longueur de la nef y compris l'abside, 27,00 m
- Largeur de la nef entre les murs latéraux, 7,00 m
- Hauteur sous le plafond, 8,50 m
Cette chapelle contient plusieurs tableaux religieux et deux ou trois statuettes sans grande valeur artistique. Nous citerons seulement :
- Un tableau représentant sainte Marthe.
- Une statue de la Vierge en bois doré du XVIIIe siècle, échappée à la Révolution.
- Le grand rétable de l'autel, en bois doré du XVIIe siècle, avec deux toiles. Au bas : l'Assomption de la sainte Vierge. Au-dessus : le Père éternel bénissant le monde.
- Enfin, une grande toile, La Flagellation, copie du tableau de Rubens appartenant au Musée de Marseille et mentionnée sur le catalogue : 402. La Flagellation : des bourreaux armés de verges et de cordes tourmentent le Christ, dépouillé jusqu'à la ceinture.
Chapelle de N.-D. de Lorette
Ce petit sanctuaire appelé vulgairement la Capeletto et dédié à N.-D. de Lorette, était situé à l'ancien quartier de Suveriés ou de la Barbarie, sur le chemin de Saint-Antoine, allant à Ceyreste. Il fut fondé le 1er octobre 1678 par Jean Gamel. Ses neveux Louis et Jean assignèrent à cet oratoire une rente de 15 livres par an à l'effet d'y célébrer une messe par mois.
Chapelle N.-D. de Conil
Cette chapelle, mentionnée en 1620 N.-D. de la Miséricorde de Conilh[1] fut un lieu de pèlerinage très fréquenté jusqu'au milieu du XVIIIe siècle. Aujourd'hui il n'en reste plus de trace. Conil est vulgairement appelé la Begude parce qu'il est situé sur le bord d'une route traversant un bois et à côté d'une source. C'était anciennement un lieu de repos pour les voyageurs qui allaient de Toulon à Marseille en suivant la voie de l'intérieur, comme Poutié l'était pour ceux qui préféraient suivre la voie du littoral.
Chapelle N.-D. de Consolation
Cette chapelle, construite dans le courant du XVIIe siècle au quartier de la Loubière sur l'emplacement d'un autre sanctuaire plus ancien, fut réparée en 1758 et en 1772. Abandonnée pendant la Révolution et tombée en ruines depuis cette époque elle a complètement disparu. Un petit oratoire également en ruines marque la place qu'elle occupait.
[1] Archives de la Cadière. Documents ant. à 1790.
Fontaine de Saint-André
En 1900, la Cadière avait encore une jolie fontaine : celle de Saint-André, située sur la place publique, en face de la porte du Peï et de l'Hôtel de Ville. Cet édicule simple et gracieux avait été construit par Melchior Bourgarel, d'après les dessins de Joseph Lieutaud, sculpteur distingué. Au milieu d'un bassin en croix, s'élevait une petite pyramide carrée, portant un vase sphérique, surmonté d'une statue de saint André, due au ciseau de cet artiste. De la partie inférieure du vase sphérique, quatre mascarons aux joues boursouflées versaient une gerbe d'eau limpide dans chaque lobe du bassin et tout en l'animant complétaient l'ensemble architectural de ce gracieux monument. En 1862, un violent orage renversa la statue de saint André et la brisa. On la remplaça aussitôt par une autre figure du même saint, sortie des ateliers de M. Bontoux, de Marseille. En 1900, la Municipalité avancée de la Cadière, offusquée peut-être d'avoir l'image d'un saint devant ses fenêtres, délibéra d'embellir la grande place de la Cité. Pour cela, elle fit abattre des ormes centenaires, enleva les bancs rustiques en pierres de taille portant la date 1759, et fut sans pitié pour la jolie fontaine de Bourgarel qui donnait une physionomie si originale à ce coin du village. Maintenant la place de l'Hôtel de Ville privée de ses grands arbres, dépouillée de ces vieux bancs de pierre et veuve d'une œuvre d'art d'un enfant du pays, est devenue une allée banale, comme on en voit tant. Encombrée de deux fontaines sans caractère, sans style et sans grâce, avec une table de pierre au milieu pour les marchands d'occasion, elle n'a plus aucun charme ni aucun attrait pour les habitants du pays, et l'étranger qui la traverse passe mais ne s'y arrête pas. Nous plaignons sincèrement les habitants des communes qui ont à subir de tels agissements de la part de leurs édiles et nous protestons de toutes nos forces contre ces actes de vandalisme.
Joseph Lieutaud, né à la Ciotat le 26 juillet 1644, est mort le 28 décembre 1726 à la Cadière, dont sa famille était originaire et où il s'était retiré en 1687. Après un séjour d'environ vingt ans à Rome, où il travailla quelques temps sous la direction du cavalier Bernin, il vint à Toulon et fut employé dans l'atelier particulier de Pierre Puget dont il devint l'ami. On connaît de lui les œuvres suivantes :
- Le grand autel en marbre et le sanctuaire, en plâtre doré, de l'église de Saint-Maximin.
- Une statue de saint Pierre pour la salle des Prud'hommes de la Ciotat.
- Une statue de saint François de Sales destinée à l'église de Bandol, restée dans sa famille à la Cadière.
- Enfin la statue en pierre de saint André qui surmontait la fontaine de la place publique de la Cadière, brisée en 1862.
Chapelle de Saint-André
L'oratoire de Saint-André est une petite chapelle votive, située au quartier des Hautes, sur la route de Bandol. Elle fut construite après la peste de 1720, qui désola la plus grande partie du département du Var, mais dont le village de la Cadière fut préservé. Ce petit édifice, sur la façade duquel on voit une niche renfermant l'image de saint André a été converti en grange.
Sculptures
Dans l'ancienne rue Miséricorde, aujourd'hui rue République, on voit sous les rampants des toits de trois maisons, des têtes grotesques sculptées à l'extrémité des poutres d'angle. La première représente la face d'un ange ailé ; la deuxième, une tête grimaçante ; et la troisième, le masque d'un sauvage iroquois.
Saint-Cyr-sur-mer : les ruines de Tauroentum vers 1900
La chapelle avant restautation (cliché DRAC)
La chapelle, état actuel (cliché PV)
La chapelle Saint-Jean Baptiste vers 1950
La chapelle Saint-Jean Baptiste vers 1970
La fontaine Saint-Jean et ses mascarons, état actuel
Le clocher et l'entrée (cartes postales vers 1960)
La chapelle Sainte-Magdeleine vers 1900
La chapelle Saint-Eloi vers 1900
La chapelle N.D. de la Miséricorde vers 1900
La chapelle de Saint-André vers 1980 (cliché Renée Méric)